Publié le mardi 02 novembre 2010 à 11H00
Le poste de directeur de la délégation est vacant depuis mi-septembre. La secrétaire, les deux animatrices et une aide comptable tout comme le siège ne souhaitent commenter ce licenciement.
AISNE. Il œuvrait au Secours catholique depuis 26 ans et dirigeait la délégation de l'Aisne. Philippe Mesnigé a été licencié. Une exclusion qui sème un plus que le trouble.
LA délégation diocésaine du Secours catholique de l'Aisne, autrement dit, le siège de l'organisation dans notre département a perdu son directeur depuis plusieurs semaines. Et pour cause : cette absence, ce « départ » dans les mots du président de l'association Eric de Villeroché, est le résultat d'un licenciement prononcé pendant l'été par le siège parisien du Secours catholique.
L'affaire suscite un émoi incontestable chez les 450 bénévoles de cette délégation, absolument pas habitués à voir l'association qu'ils servent exclure l'un de ses salariés et de manière semble-t-il relativement abrupte.
De tout cela, il ne sera jamais question chez Pierre Levené, le directeur de cette hyperstructure (*). Même chose chez Daniel Vallier, le patron de la DRH de l'association.
De même, les quelques bénévoles qui ont ébruité l'affaire ont-ils consigné aujourd'hui de verrouiller tout commentaire. Bref, c'est peu dire que le licenciement de Philippe Mesnigé, 48 ans, père de quatre enfants, délégué en poste depuis 12 ans à Soissons, fait tache au pays de l'humanitaire.
« Je vais me battre »
Philippe Mesnigé a-t-il été victime d'une « intrigue malveillante et malsaine » au sein de la délégation de Soissons ? Cette question, c'est une bénévole qui l'a posée mi octobre au président national du Secours catholique, l'économiste rocardien, François Soulage. Question qui reste aujourd'hui sans réponse.
« Je ne trouve pas les mots pour exprimer mon désarroi concernant ce licenciement », entend-on encore de la part de ces petites mains -la délégation de l'Aisne demeure une structure de taille modeste- qui à longueur d'année donnent vie aux actions locales ou internationales du Secours catholique. Philippe Mesnigé n'est pas le plus loquace.
Il est engagé auprès du Secours catholique depuis 26 ans. Et il s'avoue surpris et pour tout dire assez gêné par la révolte et le soutien de quelques bénévoles.
« Ce qui est certains », confie pourtant cet ancien responsable « c'est que je vais me battre pour que ma dignité soit rétablie. Je ne ferai aucun autre commentaire », coupe-t-il aimablement en soulignant qu'un avocat de ses amis défend désormais ses intérêts.
Une réunion contre… l'exclusion
Un responsable du Secours catholique licencié, quasiment en catimini et pour des motifs dont la gravité a été publiquement exposée à certains, voilà de quoi déclencher une vague d'interrogations dans la communauté.
L'enjeu et le danger de ces remous ont parfaitement été saisis par le siège national qui ne craint rien tant qu'un affaiblissement des engagements à quelques jours du lancement d'une vaste campagne d'appel aux dons. Tout a donc été mis en œuvre, côté hiérarchie, pour désamorcer la crise latente. Le samedi 16 octobre par exemple. Il est 17 h 30 ce jour-là lorsque débute à l'église de la Résurrection, au quartier de Presles à Soissons, la conférence donnée par le président national François Soulage. Ce brillant esprit est également ambassadeur pour la France de l'année européenne de lutte contre la pauvreté et… l'exclusion sociale. Ce 16 octobre, il est accompagné de l'évêque de Soissons, Laon et Saint-Quentin, Mgr Hervé Giraud et par Eric de Villeroché, le président de la délégation axonaise. Des personnalités qui, un peu moins de deux heures avant la fameuse conférence, ont rencontré les bénévoles déboussolés « afin de faire le point sur le licenciement de Philippe Mesnigé ». Les militants en quête de réponse n'avaient pas prévu un élément : ce jour-là en effet, les salariés de l'association avaient été invités eux aussi.
Le siège national a été amené à procéder au licenciement du délégué de l'Aisne mi-septembre « compte tenu de difficultés importantes et répétées de collaboration constatées ».
Témoins à charge
Voilà donc résumé de manière très laconique les griefs retenus contre le délégué départemental. Pierre Levené, le secrétaire général de l'association n'est pas allé plus loin dans ses explications mais le courrier qu'il expédiait le 24 septembre dernier aux « bénévoles en responsabilité de la délégation de l'Aisne », laisse peu d'espoirs à ceux qui voyaient en Philippe Mesnigé un homme « correct, poli et très courtois ». Un homme que l'on accuse sur le papier d'insubordination alors que c'est une tout autre version qui a été exposée à certains responsables. Et cette version met directement en jeu le témoignage de trois des quatre salariées du siège Soissonnais, trois femmes, Laurine, Valérie et Elisabeth, dont deux animatrices embauchées par l'association depuis quelques mois seulement.
« Pourquoi le conseil d'animation, organe responsable au sein de la délégation, n'a pas été informé de ce qui se passait », questionne ainsi Daniel, un bénévole. « Cela amène ses membres », ajoute-t-il « à penser que les témoins à charge ont été entendus et les témoins à décharge écartés ».
Philippe Mesnigé a été licencié sans préavis et sans indemnité. Il n'est pas interdit de penser que son ancien employeur nuancera en partie cette affirmation dans quelques jours.
Yves KLEIN
* Au 106 rue du Bac à Paris, Pierre Levené, le directeur est annoncé « en vacances ».